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Tu me condamnes à vivre, et pourtant tu m’abandonnes ! Faut-il donc que le seul coupable échappe au châtiment. Ne m’abandonne pas, Leonora !
Alvaro à Leonora (Acte IV, dernière scène)

Ces quelques mots résument bien à eux seuls l’ampleur de la malédiction qui balaie cette œuvre tout du long.

Verdi en Russie, oui ! Mais Victor Hugo : « niet »

A la recherche de sujets pour ses opéras, Verdi regardait de préférence du côté de Shakespeare, Victor Hugo, Schiller ou encore Byron. S’il a privilégié le dramaturge anglais pour ses opéras précédents et qu’au début de sa carrière, Victor Hugo est sa source de prédilection, c’est vers ce dernier qu’il revient lorsque Saint-Pétersbourg lui commande pour la première fois, en 1861, une nouvelle œuvre. Verdi propose alors Ruy Blas. Emmener le subversif Hugo en Russie est un pari osé et pour la censure impériale : c’est « niet » ! Si Verdi peut composer ce qu’il veut, il lui faut pourtant une histoire. Exit le dangereux Hugo mais place à l’un de ses admirateurs et disciples. C’est une pièce signée Don Ángel de Saavedra, Duc de Rivas, qui lui est présentée et qu’il accepte : Don Álvaro o la fuerza del sino. Même si Verdi trouve cette histoire forte, spéciale ou encore extraordinaire, il la modifiera tout de même quelque peu.

Don Ángel de Saavedra
Don Ángel de Saavedra

Quelle histoire, quelle musique !

Modifiée à plusieurs reprises, cette œuvre, tantôt sombre, tantôt excessive ou parfois un brin confuse (son livret n’aurait rien à envier à celui d’Il Trovatore), débute par l’une des plus célèbres ouvertures du Maître, dont le cinéma s’est d’ailleurs régalé, et recèle un inimaginable flot de trouvailles musicales. Moins intensément concentré que le précédent Un Ballo in maschera, l’ouvrage est aussi beaucoup plus varié, plus vivant et plus ouvert dans sa composition. Il y règne tout au long un bel canto sublimé au travers duquel le romantisme, la passion, l’intériorité et le désespoir des personnages offrent de magnifiques exemples d’écriture vocale. L’une des partitions les plus riches de Verdi !