Spectacle

Focus sur « Simon Boccanegra » de Verdi

Simon Boccanegra : une œuvre « virile ». Effectivement, lorsqu’on opère un rapide recensement dans cet opéra tant au niveau de la répartition des rôles que des actions qui y sont présentées, c’est assez musclé. On comptabilise deux barytons (Simon & Paolo Albiani), deux basses (Jacopo Fiesco & Pietro), deux ténors (Gabriele Adorno & le capitaine des arbalétriers) pour une soprano (Amelia) et une mezzo (la servante d’Amelia).

Simon Boccanegra V1, Simon Boccanegra V2

Chez Verdi, c’est un fait, c’est rarement la qualité musicale qui constitue le problème. Par contre, la faiblesse de certains livrets peut parfois nuire à la réussite totale de l’œuvre. Heureusement que quelques-uns subissent l’une ou l’autre adaptation ou une révision heureuse qui mène par la suite à une belle reconnaissance populaire. Simon Boccanegra est de ceux-là.

En fait, la genèse de Simon Boccanegra connaît deux étapes, distantes de vingt-quatre ans. La V1 (première version) voit le jour en 1857. Le livret est signé Francesco Maria Piave, fidèle librettiste de Verdi. Elle s’inspire d’une pièce de l’auteur espagnol Antonio García Guttiérez, déjà à la source de Il Trovatore, grand succès de Verdi. Créé le 12 mars à La Fenice, le succès de Simon est cependant loin d’être au rendez-vous. Verdi est perplexe face à ce rejet, persuadé des qualités de son opéra. Malgré quelques ajustements, l’accueil du public reste tiède à chaque représentation. Verdi passe alors à autre chose.

Deux décennies plus tard, Verdi est sollicité par son éditeur Ricordi pour remanier son ouvrage. Le musicien fait alors appel à Boïto, dont le talent d’écrivain s’accorde parfaitement avec le génie musical du Maestro, pour opérer des modifications au livret. Mais cette V2 (deuxième version) sera davantage une refonte que quelques ajustements opérés de ci de là. Tandis que l’un améliore volontiers le livret, le second reconstruit la partie centrale de son œuvre.

Un chef-d’œuvre tant théâtral que musical

D’un point de vue dramatique, on assiste, dans Simon Boccanegra, à une toute nouvelle vision du rapport père-fille, thème dominant chez Verdi : une conception davantage optimiste portée par un regard pacifiant. D’un point de vue musical, l’œuvre témoigne d’un grand raffinement d’écriture et d’un savant dosage des effets, un peu comme dans la partition d’Otello, quelques années plus tard, une sorte d’amorce, voire le premier grand volet des œuvres tardives du maître. Trop rarement joué, Simon Boccanegra est assurément à découvrir.