Spectacle

En savoir + | Il Turco in Italia

A l’époque, Rossini recyclait et ce n’était un secret pour personne. Soumis à un rythme effréné de composition, il lui arrivait de manière régulière de rependre un morceau, un air par-ci par-là, de le réassaisonner ou non, de mélanger le tout, puis le tour était joué : un nouvel opéra avec peu de « par-ci par-là ». Avec Il Turco in Italia, Rossini est accusé d’auto-plagiat, certains lui trouvant un air de « déjà vu », alors que cette fois, tout était neuf !  Décidément, la vie est injuste…

Du Rossini et plus encore

En signant Il Turco in Italia, le cygne de Pesaro clôt ainsi un ensemble de trois bien séduisantes « turqueries ». Après La Pietra del paragone et L’Italiana in Algeri, le public milanais découvre, en 1814, ce troisième épisode qu’il boude prétextant, à tort cependant, un nouvel emprunt.

Et pourtant, Rossini y est magistral, plus encore qu’à son habitude. Plus exigeant musicalement, tout en conservant la légèreté, la virtuosité et la gaieté qu’on lui connaît, Rossini apporte à cet opéra-bouffe quelque chose de plus subtil encore, de profondément théâtral dans le traitement et dans les thèmes évoqués – la fidélité, les rapports amoureux, la liberté – s’éloignant quelque peu d’une certaine forme de tradition napolitaine.

Mozart en héritage

Dans la grande famille de la musique, la part de l’héritage mozartien peut être plus ou moins grande chez certains compositeurs. On peut la retrouver chez Beethoven et, dans le répertoire lyrique, elle est de première importance chez Rossini.

 Côté livret, celui d’Il Turco tournoie, virevolte un peu « à la » Così fan tutte et s’articule sensiblement de la même manière : un quintette amoureux, s’articulant autour d’un personnage, est soumis, par les manipulations d’un tiers, à de rudes épreuves. De cet imbroglio découlent situations cocasses, jeux de faux semblants… Mais, Rossini voit dans cette trame bien plus une réflexion sur le sentiment, les nuances de l’amour, de la fidélité, de la sensualité ou encore de la mélancolie, qu’un simple canevas comique.

Côté musique et chant, la partition rossinienne déploie une ampleur symphonique magistrale de l’orchestre et réclame autant de voix exceptionnelles qu’il y a de personnages. Les récits y sont précis et denses, et les ensembles vocaux d’une virtuosité d’écriture unique.

Même si Il Turco in Italia semble s’inscrire dans une forme de sillage mozartien, Rossini n’y est pas moins unique et grandiose, jouant de manière remarquable avec les codes de la comédie et de la tragédie, en y appliquant les procédés musicaux caractéristiques qui ont fait son succès.